Traduction de l’article « The Rebuilding And The Autism Full Employment Act Of 2021 » de Michael Bernick, paru le 25 août 2020 dans Forbes.

Quelle place pour les adultes autistes dans les initiatives de retour à l’emploi post-pandémique ?
Dernier article d’une série débutée en mars sur les effets de la pandémie sur l’emploi et la reconstruction d’une base des emplois aux États-Unis.
Articles de Michael Bernick
À plusieurs reprises au cours de la période qui a suivi la Seconde Guerre mondiale, les ralentissements économiques ont conduit les éditorialistes et les commentateurs à déclarer que « la vie ne sera plus jamais la même», ou «notre économie ne sera plus jamais comme avant ». Puis, dans un laps de temps relativement court, la récession prend fin et la vie quotidienne et l’économie reviennent en grande partie à ce qu’elles étaient auparavant. Mais le ralentissement économique lié à la pandémie diffère de deux manières importantes des précédents ralentissements.
Premièrement, il a nivelé le paysage économique, entraînant des fermetures d’entreprises et des emplois perdus de façon permanente au-delà de l’ampleur de tout événement depuis la Grande Dépression des années 1930.
Deuxièmement, cela a conduit à des dépenses publiques sans précédent simplement pour stabiliser l’économie, et à l’abandon des limites antérieures des déficits fédéraux et des dépenses déficitaires.
À moins que l’économie ne reprenne de façon spectaculaire au cours du prochain trimestre, une relance de la reprise est probable au début de 2021, d’un montant supérieur même à la loi CARES de 3 milliards de dollars. Les think tanks de Washington DC, le Forum économique mondial et d’autres groupes politiques préparent déjà leurs listes d’initiatives pour l’emploi. Aucune de ces longues listes n’inclut l’emploi d’adultes autistes ou présentant d’autres différences de développement. Y a-t-il une place dans un effort de rétablissement en 2021 pour ces adultes?
Voyons à quoi pourrait ressembler une loi sur le plein emploi pour les personnes autistes en 2021. Elle ne suivrait pas les lignes directrices des autres financements et subvention du gouvernement. Elle serait enracinée dans les efforts d’auto-assistance déjà en cours dans la communauté de l’autisme et renforcerait ce rôle avec un financement ciblé de relance économique. Elle s’appuierait sur les prestataires intermédiaires de l’emploi reconnus, aux niveaux local et national (Autism Speaks, Best Buddies, Autism Society), et éviterait une nouvelle bureaucratie nationale. Surtout, elle s’inspirerait des expériences de centaines d’initiatives récentes en faveur de l’emploi des personnes autistes à travers le pays.
Les détails de la loi seraient complétés au cours des quatre prochains mois par la communauté autiste elle-même, avec l’aide de ses partenaires universitaires, des centres d’emploi pour l’autisme de Stanford, Cornell et UCLA. Cependant, un aperçu global des stratégies, en quatre catégories générales, peut être présenté ici. Ces stratégies parlent de travailleurs autistes, bien que l’autisme soit censé inclure l’univers plus large des adultes ayant des différences de développement.
1. Élargissement des initiatives en matière d’emploi pour les personnes autistes dans les entreprises du secteur privé, grandes et petites
L’embauche par des entreprises privées commence par les efforts de militantisme et de bénévolat des membres de la famille au sein de leur entreprise. La dernière décennie a vu une explosion d’initiatives ciblées pour l’emploi des personnes autistes dans le secteur privé, y compris chez certains des plus grands employeurs américains – Microsoft, SAP, Ford. Dans la plupart des cas, les initiatives ont été le résultat de plaidoyers des membres de la famille au sein de ces entreprises. La loi reconnaîtra et cherchera à encourager cette auto-assistance. Elle cherchera à encourager d’autres formes d’assistance et d’entraide mutuelle : les cercles dédiés à l’emploi, le mentorat bénévole…
La loi augmentera l’auto-assistance avec des subventions salariales ciblées, afin de compenser les coûts plus élevés de formation et de maintien en poste qui seront engagés pour un segment de la main-d’œuvre autiste. Les États-Unis ont essayé de mettre en place plusieurs crédits d’impôt et incitations à l’embauche : le Federal Work Opportunity Tax Credit, le Work Experience et les subventions en cours d’emploi dans le cadre de la WIOA, et même des subventions salariales (jusqu’à 100%) par le biais de programmes liés au handicap dans les états. Dans l’ensemble, ces mesures incitatives n’ont pas eu beaucoup d’incidence sur le recrutement durant les dernières années. Cependant, les incitations à l’embauche pourraient être prises plus au sérieux par les entreprises dans l’économie d’après la pandémie, où les budgets d’embauche sont plus serrés.
En élaborant les subventions à l’embauche, les architectes de la loi veulent s’appuyer sur les incitations qui ont jusqu’à présent eu les meilleurs résultats. Il s’agit des subventions administrées par des administrateurs tiers et des employeurs officiels, qui continuent de diminuer au fil du temps et qui se concentrent sur les entreprises de taille moyenne et de petite taille.
2. Le gouvernement des États-Unis et les états à l’échelon local encouragent les employeurs privés à embaucher des travailleurs ayant des différences de développement
Il est maintenant temps d’appliquer cela eux-mêmes. Le gouvernement des États-Unis et les états à l’échelon local incitent fortement les employeurs privés à embaucher des travailleurs ayant des différences de développement, mais ils ont peu appliquer cela à leurs propres effectifs. Plusieurs forces sont en jeu : les règles de la fonction publique, l’inertie des bureaucraties gouvernementales, un sentiment de droit parmi les effectifs actuels. En 2015, par exemple, la législation de l’État de Californie a créé le programme de stages de l’État pour les jeunes adultes handicapés, comme un pied-dans-la-porte pour accéder à des postes d’assistant de bureau dans la fonction publique. Malgré des efforts de marketing actifs auprès des départements d’État, au cours des cinq dernières années, le programme n’a pu générer que 12 stages (l’effectif de la fonction publique de l’État en Californie est supérieur à 218 000 personnes). Les responsables du recrutement des départements considèrent que le « recrutement des personnes handicapées » nécessite du temps supplémentaire et ne relève pas de leurs missions principales.
En ouvrant plus largement l’embauche dans le secteur public aux travailleurs ayant des différences de développement, la loi tirera parti d’autres fonds de redressement qui vont aux États et aux municipalités. Ces fonds peuvent comporter de nouvelles formes d’exigences ou de processus d’embauche. En fin de compte, les résultats de l’embauche et du maintien en poste exigeront un « changement de culture », l’adhésion des gestionnaires du secteur public, qui dépasse tout financement. Mais les exigences d’embauche de la Loi peuvent être un début.
3. Professionnalisation des soutiens directs à l’emploi dans le domaine du handicap
Les coachs, les conseillers en emploi et les promoteurs d’emploi forment les premières lignes de l’emploi des personnes autistes. Actuellement, plusieurs efforts sont en cours au niveau national par l’intermédiaire de la National Association of Disability Service Providers et du America’s Network of Community Options and Resources pour professionnaliser cette main-d’œuvre et réduire le turnover élevé à ces postes grâce au développement continu des compétences, aux certifications et aux échelles de carrière.
La nouvelle loi encouragera ces efforts, tout en s’attaquant également à la principale source de turnover : les bas salaires. Les salaires des professionnels accompagnants et des autres travailleurs de soutien direct sont souvent proches du salaire minimum. Proposer des professionnels d’accompagnement convenablement rémunérés sera une priorité de la Loi.
4. Attention à l’emploi pour les personnes plus sévèrement touchées, y compris l’emploi subventionné dans les postes de la fonction publique
Les initiatives pour les profils de personnes autistes dites de haut niveau, comme dans les entreprises « Autism at Work » se sont concentrées sur les adultes autistes ayant des compétences plus avancées, en particulier des compétences dans le secteur des nouvelles technologies. Il s’agit d’un petit segment de la main-d’œuvre des adultes autistes. La loi accordera une attention aux personnes plus sévèrement touchées – ceux qui ne sont pas considérés comme ayant «un autisme avantageux » grâce aux compétences savantes ou à la concentration. Parmi les stratégies destinées à ce groupe de personnes, la loi s’intéressera aux emplois subventionnés dans la fonction publique. Ces embauches se font maintenant à petite échelle sur des projets à travers le pays dans le domaine de l’entretien et le nettoyage des parcs et des espaces verts, l’aménagement paysager municipal, l’aide aux établissements de soins de longue durée et le soutien aux musées.
Janet Lawson, directrice de longue date des studios Autistry à San Rafael, en Californie, une organisation à but non lucratif au service des adultes autistes, s’est associée au National Park Service sur des projets d’emploi subventionnés dans la fonction publique, notamment l’entretien des sentiers et des installations, la taille des buissons / arbres, et servir les visiteurs dans les stands de concession. Elle écrit cela plus tôt dans le mois :
"Les Park Rangers rapportent que les équipes d’Autistry ont été d’un grand soutien et d’une grande aide dans les parcs. Les équipes d’Autistry ont appris à identifier les différentes espèces envahissantes présentes dans les parcs et ont aidé les Rangers à la fois à maintenir l’aménagement paysager esthétique des parcs et à gérer l’équilibre de la vie végétale originelle."
Elle a un partenariat similaire avec le Western Railway Museum, offrant des postes subventionnés à des adultes autistes dans la numérisation et l’archivage de photographies historiques, en aidant à des projets de restauration, en travaillant avec le personnel du musée dans des expositions spécialisées. Lawson ajoute que plusieurs de ces adultes travaillent pour obtenir des diplômes ou des certificats en éducation de la petite enfance et ont occupé des postes subventionnés dans des garderies locales.
Une place sur le marché du travail pour tous les adultes autistes ou ayant d’autres différences de développement, aussi graves soient-elles, qui veulent travailler est la vision qui anime une grande partie des acteurs de l’emploi des personnes autistes aujourd’hui. Une reprise de l’économie au début de 2021, à mesure qu’elle émergera, fournira une rare opportunité de progresser vers cette vision. Il appartient maintenant aux adultes autistes, aux membres de la famille et à leurs alliés de faire avancer la loi.
© Traduction Natacha Eté pour PAARI
